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« Je monte la garde »

Je m’intéresse à la notion du Shabbath dernièrement.

Le Shabbath est une pratique juive qui s’observe un jour sur sept et consiste en un repos du travail. Selon les Écritures juives, Dieu a travaillé pendant six jours à créer, et le septième jour, Il a donné à l’humanité un exemple à suivre en prenant une pause du travail.

C’était un cadeau bien particulier pour eux, après une longue période d’esclavage et d’oppression — la reconnaissance de la dignité de leur humanité.

Aujourd’hui, au Canada, nous ne sommes pas des esclaves au sens politique, mais je me demande si la culture selon laquelle il faut produire toujours plus n’est pas une forme d’esclavage. Le type de « production » peut varier d’une personne à l’autre. Peut-être s’agit-il de présenter une esthétique digne de Pinterest par nos vêtements, notre décoration intérieure ou notre savoir-faire artisanal. Peut-être est-ce d’atteindre un objectif au travail, au gym ou sur le terrain. Peut-être est-ce simplement le fait de devoir être disponible en tout temps, à la merci de notre téléphone. Peu importe ce que vous devez produire, est-ce que votre rythme actuel est insoutenable?

Quand je suivais l’instruction de base (il y a fort longtemps), un membre de mon peloton avait dit que « le sommeil est pour les faibles et pour ceux qui ne se battent pas ». Ça ne m’avait pas plu alors, et ça ne me plaît toujours pas. C’est une de ces expressions qui sonnent vraies, mais en m’y intéressant de plus près, je vois les failles — la brèche dans l’armure. Dormir est essentiel, et on n’y parvient que dans un climat de confiance.

Quel est le lien entre la confiance et le repos? Eh! Bien, lorsque vous êtes sur le terrain ou en mer, quand vous reposez-vous? Quand quelqu’un d’autre monte la garde. Ma capacité de me reposer est directement liée à la confiance que j’accorde aux personnes qui m’entourent. Le sommeil ou le repos devient alors non pas un signe de faiblesse, mais une manifestation de la force que nous avons ensemble. Je n’ai pas à me tenir aux aguets en tout temps. Je peux me reposer en sachant que je ne suis pas seul et que lorsque le moment de me battre viendra, vous me réveillerez, et nous serons plus forts ensemble. Et je ferai la même chose pour vous.

Bien sûr, pour que cela fonctionne, nous devons établir ce lien de confiance. La solidarité ne survient pas par hasard. D’abord, sommes-nous vous et moi des personnes dignes de confiance? Ensuite, sommes-nous vous et moi des personnes qui peuvent apprendre à faire confiance à l’autre? Et enfin, sommes-nous des personnes qui peuvent choisir de se reposer? Ce ne sont pas là des questions « oui ou non », mais plutôt des compétences à acquérir et avec lesquelles grandir.

Vous bénéficiez déjà de la dignité de votre humanité. En cette période de congé en bloc, prenons un moment pour réfléchir aux exigences et aux attentes que nous devons satisfaire. Sont-elles réelles ou seulement perçues? Ne les laissons pas nous priver du repos qui fait notre force et de la confiance qui nous permet de nous reposer.

Par : Ltv Shiya Janzen, Directrice de cours des aumôniers