Au début des années 1950, le Programme d’entraînement aérien du Commonwealth britannique a aidé à établir un programme de formation des pilotes de l’Aviation royale du Canada (ARC) pour répondre aux nouvelles exigences de la guerre froide. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, former des pilotes militaires était une nécessité absolue – que ce soit pour les escadrons de l’OTAN dans le cadre de la défense de l’Europe, les forces du NORAD dans le cadre de la défense de l’Amérique du Nord ou les unités de l’ONU employées dans le cadre des opérations de maintien de la paix à l’échelle mondiale. Robert Heckadon s’est joint au Programme universitaire d’entraînement aérien (Réserve) en 1952 pour y occuper un emploi d’été, mais l’expérience qu’il y a vécue a façonné complètement son avenir.
Il a commencé sa formation à la station Centralia de l’ARC, où il a appris à piloter l’avion-école Harvard, l’avion-école à réaction T33 et le Mustang. Tous les instructeurs de Robert étaient des pilotes de chasse ayant participé à la Seconde Guerre mondiale.
« Ils étaient d’excellents pilotes », a écrit Robert dans l’un de ses nombreux courriels adressés à ses enfants dans lesquels ils décrivaient ses expériences de vol. « En tant qu’élève, vous n’osiez pas demander à ces gars-là de vous raconter des histoires, mais ils en savaient beaucoup plus sur le pilotage que les membres de l’Armée de l’air, car leur enseignement pouvait être tiré d’expériences qu’ils avaient vécues. »
Une fois, alors que Robert volait à 20 000 pieds, l’un des instructeurs est soudainement apparu au-dessus de son avion, à l’envers dans un autre T33 à environ 15 à 25 pieds au-dessus, et lui a fait un signe de la main, comme dans le film Top Gun.
Robert s’est également souvenu d’« avoir volé avec un instructeur pendant environ une heure. Normalement, après le vol, le groupe se réunissait pour voir comment la journée s’était déroulée. Ce jour-là, c’était différent. L’un des officiers supérieurs est entré et a lancé : “TOUS LES ÉLÈVES AUX COMMANDES MAINTENANT”. Personne n’avait la moindre idée de la raison d’être de cet ordre, mais nous sommes tous montés dans nos avions et avons volé en solo pendant la demi-heure suivante. Nous avons découvert plus tard que c’était parce qu’un des élèves-pilotes avait été tué dans un accident d’avion. Les instructeurs nous avaient forcés à voler pour que nous n’ayons pas vent de l’accident et ne remettions pas en question notre confiance en nous et nos capacités. Ainsi, nous saurions que nous étions encore capables de piloter. » Robert a affirmé que chaque fois qu’il se produisait un accident, des élèves faisaient leurs valises et rentraient chez eux. Cependant, comme il n’avait aucun autre moyen de payer ses études, il a poursuivi la formation. « Il existe une étrange coïncidence entre les hommes qui se sont écrasés [pendant la formation]. Ils avaient le même nom de famille! Par exemple, s’il y avait deux Thompson, l’un des deux trouvait la mort. S’il y avait deux Smith, l’un d’eux était tué l’été suivant. C’était étrange. J’étais content qu’il n’y ait pas d’autre Heckadon suivant la formation!
Robert a rencontré sa future épouse, Camilla, alors qu’il servait en tant que capitaine d’aviation dans l’Armée de l’air. Il a dit à la blague : « On m’a dit que les filles aiment les hommes en uniforme. » Cette période de sa jeunesse lui a permis d’acquérir une confiance et des compétences pratiques sur lesquelles il pourrait s’appuyer en aval. Elle a également été l’élément déclencheur d’une aventure créative tout aussi inattendue.
En 2017, Robert a soumis une photographie à accrocher dans la première galerie de The Steel Spirit, dans laquelle étaient présentées des œuvres d’art et des photographies de militaires. Il n’a jamais été photographe professionnel, mais a toujours aimé la photographie comme passe-temps. Sa photo a été prise dans les années 1950 depuis le siège arrière d’un avion de chasse T33 tandis que ses collègues pilotes volaient en formation.
Robert aimait prendre des photos de ses expériences dans l’Armée de l’air, mais la pellicule coûtait cher, si bien que seule une poignée de photos étaient de qualité et bon nombre de photos étaient floues. Après l’université, il a pu se lancer dans le poudrage aérien des cultures, ce qui l’a aidé à payer ses études de médecine. Son film préféré était Les plus belles années de notre vie, qui traitait de soldats blessés pendant la Seconde Guerre mondiale. Le film montrait comment les gens composaient avec la perte de membres et la chirurgie reconstructive. Robert s’est ensuite spécialisé en chirurgie plastique pour aider les personnes gravement blessées.
Par la suite, Robert est devenu président du comité de planification des interventions en cas d’urgence ou de catastrophe du comté d’Essex, a été directeur de la clinique d’orthophonie maxillo-faciale puis chef du personnel médical à l’hôpital Hôtel-Dieu de Windsor. En 2016, il a reçu la Médaille du président de l’Université de Toronto en reconnaissance de fait qu’il avait été l’un des pionniers de la chirurgie plastique au Canada.
Robert a vu son amour pour la photographie évoluer au fil des ans, celui-ci adoptant avec le temps un style documentaire. Ses photos étaient centrées sur les personnes, les expériences et les choses qu’il avait vraiment aimées au fil des ans.
À l’âge de 84 ans, Robert a été ravi d’apprendre qu’il pourrait accrocher les photos de sa formation au pilotage dans la galerie, afin de partager un portrait d’une époque qui avait non seulement marqué le début de son documentaire photo, mais qui avait également jeté les solides assises sur lesquelles s’articulerait le reste de sa vie. Depuis son passage dans l’ARC, il avait toujours considéré chaque expérience comme un chapitre d’un livre de « vie » beaucoup plus vaste.
Malheureusement, Robert Heckadon est décédé trois mois seulement avant l’ouverture de la galerie. Sa biographie a été encadrée sous les photos du T33 affichées dans la galerie de The Steel Spirit.
La fille de Robert, et fondatrice de The Steel Spirit, Barbara Brown (née Heckadon), a ouvert la première galerie en 2017 pour s’occuper pendant le séjour d’un an de son mari à l’étranger en tant qu’enquêteur sur les crimes de guerre. Son mari ayant servi dans des missions internationales militaires et policières et son père ayant été pilote dans l’ARC, elle voulait montrer son soutien aux nombreux autres militaires et sa reconnaissance de leurs talents en dehors du service.
« Mon mari et mon père ont été ma source d’inspiration pour démarrer les galeries », a déclaré Mme Brown. « Une personne présente une multitude d’autres facettes que celles mises de l’avant dans le cadre de son travail. Ce sont ces facettes qui forment chacune des histoires et ces histoires qui inspirent les autres. »
The Steel Spirit a continué de grandir et d’évoluer et compte maintenant plus de 60 artistes parmi ses contributeurs. Consultez le site www.thesteelspirit.ca pour obtenir de plus amples renseignements.